Le sexisme au cinéma – Les liaisons dangereuses 1960

Flog

Mon essais précédent sur Love Actually m'a rappelé un des films qui m'avait particulièrement choqué: Les liaisons dangereuses 1960 de Roger Vadim (1959).

C'était le jazz qui m'avait conduit à ce film il y a quelques années, puisque c'est en effet Art Blakey et les Jazz Messengers qui ont composé la bande-son du film (dont notamment l'excellent thème No problem) et qui apparaissent d'ailleurs dans celui-ci. L'affiche n'étant pas en reste, puisqu'on retrouve entre autres Gérard Phillippe (Valmont) et Jeanne Moreau (Juliette) dans les rôles principaux.

La scène qui m'avait scandalisée dans le film survient vers la 38e minute: on voit Valmont rentrer comme un pervers durant la nuit dans la chambre de sa jeune cousine, Cécile. Celle-ci dort, Valmont la réveille et lorsqu'elle lui demande de s'en aller, il lui répond Tais-toi ! Pas de caprices de ce genre avec moi.. Comble du comble, Cécile lui demande pardon.

Tandis qu'ils écoutent un enregistrement stupide de Valmont sur un magnétophone, Valmont se met à lui caresser la jambe. Elle le repousse d'un geste de la main. Il recommence à la tripoter. Elle se relève et lui dis de s'en aller, puis qu'elle va prévenir la maisonnée. Que fais alors Valmont ? Il la menace: si elle fait du scandale, il dira tout à l'homme qu'elle aime (un autre homme, Danceny).

Dans le dialogue qui suit on retrouve de nouveau cette confusion idiote entre la haine et l'amour :

CÉCILE – Je vous déteste. VALMONT – Tu me détestes vraiment? CÉCILE – Oui. VALMONT – C'est souvent comme ça qu'on commence d'aimer. CÉCILE – Je ne vous aime pas. Je pleure.

Alors que Cécile exprime très justement ce qu'elle ressent, Valmont tente de la faire douter de ses sentiments. Je rattache cette attitude au détournement cognitif (gaslighting) dont sont victimes certains enfants. Malgré tous les refus de Cécile, Valmont insiste et insiste jusqu'à ce que finalement Cécile lui dise oui.

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Image d'épinal de la banalisation et positivisation de l'inceste et du viol par le cinéma.

Et plus tard, le personnage de Juliette (femme de Valmont et sa complice dans ses prédations sexuelles) de faire la morale à Cécile en ces termes:

JULIETTE – Quand on se donne à un homme on ne lui ferme pas la porte au nez, le lendemain. C'est très mal élevé, et dangereux ! S'il est furieux, il ira tout raconter. CÉCILE — Vous croyez ? JULIETTE – {...} Pense à ta réputation.

Et de conclure à Valmont : J'ai parlé à Cécile. Elle sera docile, comme on doit l'être à son âge.

Voici comment on éduque toute une génération à la culture du viol.